Le 5 Octobre,
Hier durant le dîner, j'ai sympathisé avec l'un des deux serveurs de l'hôtel. Il m' a proposé de sortir boire un verre pour me faire découvrir l'ambiance nocturne népalaise. J'ai dis oui...Et je me suis endormie! C'est lorsqu'il m'a contacté après son service aux alentours de 22 h, que je me suis rendue compte que je m'endormais super tôt. Ce sera pour une prochaine fois...
Il a beaucoup plu durant la nuit, et je profite d'une matinée libre pour flâner encore un peu dans ma chambre. Demain je quitte la ville pour les montagnes. Le début du trek s'annonce pluvieux! Pourtant j'ai hâte.
Aujourd'hui, Bhim vient me chercher à 14h pour la visite du célèbre monastère (où séjourne régulièrement Matthieu RICARD) et du Stupa de BODNATH ou BOUDHANATH Stupa : le fief des bouddhistes.
Après une longue méditation matinale, je réalise la présence d'une sorte de mouvement intérieur circulaire, comme un tourbillon s'activant sous ma poitrine (à l'endroit du coeur). Cela provoque en moi de légères nausées qui ne durent pas. Un effet de vagues.
Depuis le début de mon voyage, je parcoure avec attention le livre que m'a offert une amie avant mon départ : "'Amours inconditionnelles" de Blanche de RICHEMONT. Dans son oeuvre, l'écrivaine nous fait le récit de rencontres "extra" ordinaires (selon moi), durant lesquelles les personnes livrent leurs expériences de l'Amour inconditionnel. Dans ma démarche personnelle et spirituelle, cette quête m'intéresse, tant le message qu'il délivre sous-entend une certaine sagesse à laquelle je ne suis pas encore initiée.
Si elle s'adressait à moi, je serai bien en peine de définir aujourd'hui précisément ce que cela signifie (à la fois pour mon esprit et dans mon corps). Cependant, je me prête à cet exercice. Je pourrai d'ores et déjà affirmer spontanément que l'amour inconditionnel prend sa source dans le soi le plus profond. C'est une histoire personnelle et intime. Ce soi profond, je pourrai le visualiser comme un puit, ou plutôt une faille qui laisse entrer la lumière et qui est à la fois le point originelle de tous les possibles. A cet endroit, j'imagine que les vibrations sont intenses et sans doute sonores.
Alors que je pose ces mots sur le papier, il me semble ressentir à l'instant même cette sensation à l'intérieur du corps, là sous poitrine. Une sensation pure et authentique car dénouer d'explications rationnelles...Le filtre égotique ne l'a pas encore modifiée. Mais déjà en disant ces mots, je suis en train de transformer cette lumière.
Beaucoup de philosophes (je pense ici notamment à François CHENG, mais pas seulement) parlent de la notion d'âme divine, qu'ils dissocient d'ailleurs avec l'âme humaine. C'est comme ci cette lumière, ou cette vibration était la source divine en nous ( "Source" que les religions nomment la conscience, force, la foi, la lumière, Dieu, Vacuité dans le bouddhisme, Vérité, YHWH dans le judaïsme et Zeus dans la mythologie grecque..et j'en passe bien évidemment), et que les premiers mots qui en découlent et qui tentent de l'expliquer sont le prolongement et le début de notre âme humaine.
C'est difficile de définir physiquement lorsqu'il est question d'une perception métaphysique. Et pourtant l'impalpable se niche dans notre corps. L'Amour inconditionnel (ou l'Ouverture/l'Accueil absolu) provient de cette source là. Je le sais. Je le sens. Notre corps sert de canal de transmission à cette lumière qui rayonne en chacun d'entre nous. A cet instant, je prends conscience plus que jamais, que notre corps est fondamental pour faire vivre notre spiritualité. Il est bien au delà de ce que suppose la matière, qui le maintien dans une sorte de véhicule fait d'os, de muscles et de chair! Comme le système des poupées russes, il se nourrit à la fois de cette énergie de vie, et il est, lui-même cette énergie de vie. Notre corps est précieux et s'il renferme les plus grosses blessures, nos mémoires de souffrance, il est également et surtout celui qui nous montre nos plus belles ressources, la clef qui nous guérit.
La conscience (divine) est donc reliée à l'Amour Inconditionnel. Je dirai même que c'est une seule et même lumière.
La méditation permet la connexion à cette faille, dans le silence de nos profondeurs. Et c'est ici que naît le souffle de vie, le souffle créatif qui permet de grandir, de transformer. Ca y'est Je comprends!
Fin d'e soirée:
Beaucoup d'émotions en découvrant la ville de BODNATH. Sur la place centrale, s'impose un énorme STUPA, entouré de statuettes, de cloches et d'une multitude de moulins à prières. La foule, fait de moines bouddhistes en grand nombre, circulent tout autour du STUPA, pour certains pendant des heures entières. Ce mouvement circulaire, je le reconnais, c'est celui de ce matin. C'est ce tourbillon vécu lors de ma méditation. Je reste sans voix. Ce lieu est unique, mystique. J'ai les larmes aux yeux de rencontrer cet endroit.
Je m'engouffre dans ce cyclone, et suit le mouvement. Les mantras se répètent et résonnent dans la bouche de tous les népalais. J'entends cette fréquence sonore grave, roque, qui s'apparente au son "OM"/"AUM", vibrer à l'intérieur de mon corps. Des milliers de pigeons s'envolent et atterrissent sur la place, tandis que les moines continuent de prier avec leur collier Mala dans la main.
Je tourne et fais tourner les moulins, mon geste est naturel et aucunement contrôlé. Je tourne autour d'un axe commun, et je reconnais la puissance symbolique de ce mouvement de rotation. A ce moment là me vient la danse des derviches tourneurs dans le soufisme. Se connecter aux éléments, trouver son axe, et entrer en son centre. Telle est notre mission à tous.
Le toit du Stupa symbolise le centre, celui qui nous montre le chemin vers l'illumination. Si l'on regarde de plus près, nous percevons au dessus des yeux de Bouddha, les célèbres 13 étages ou marches qui mènent au Nirvana, à l'éveil spirituel. Je pense n'être qu'en bas de l'escalier. Et je me trouve tellement chanceuse de voir et de savoir que cet escalier existe.
Merci à Bhim, pour ce merveilleux voyage à BODNATH. Je suis à ma place, maintenant mon corps le sait vraiment.
Bhim est bouddhiste. Un bouddhiste incarné car éduqué et instruit. Il a l'esprit critique, et par conséquent lui-même a fait l'expérience corporelle de sa spiritualité. Chaque jour il médite, le yoga lui est enseigné par son "guru" depuis plus de deux ans.
Ce soir, il m'a invité à dîner auprès des siens. Une fois chez lui il est fier de me partager ses écrits à ce sujet, et ses réflexions. Que ce soit en anglais, en français, népalais, sanskrit, je me rends compte que comme moi, il chemine vers la voie(x) de l'éveil, de la conscience. Heureuse, je souris. Je vois que chacun de nous, tente ce rapprochement au plus près et au plus juste de l'axe central, de son centre. Et chacun le fait, avec ce qu'il est, avec sa vérité, son expérience, ses questions, son histoire.
Ce soir là, je passe une soirée dans une famille que je ne connais pas, si différente culturellement de la mienne, avec laquelle je ne peux établir un échange oral pour communiquer. Mais je me sens tellement proche de l'âme de chacun d'entre eux.
Une fois dans mon lit, je suis touchée par toutes ces rencontres, qu'ils s'agissent des lieux, des personnes, des animaux, et surtout cette rencontre avec moi-même.
Gratitudes.